Téléchargement PDF 11.5 MO Article d'Anne
« Comme de longs échos qui de loin se confondent. Dans une ténébreuse et profonde unité, vaste comme la nuit et comme la clarté, les parfums, les couleurs et les sons se répondent.» Charles Baudelaire |
||
Perspectives Une façon de voir exacte et abstraite vous met à même de représenter un motif avec une exactitude mécanique : la compréhension du motif vous donne la possibilité de lui donner une âme. La pratique est ce qui vous rend apte à bien utiliser votre capacité de voir et de comprendre. C’est l’entrainement dont vous avez besoin pour transformer en contours, couleurs, ombres et surfaces sur un support papier ou une toile ce que vous voyez et ce que vous saisissez avec votre intelligence. La perspective n’est qu’une série de techniques qui permet de dessiner une scène tridimensionnelle sur une surface bidimensionnelle. En d’autres termes, elle est le procédé qui suscite l’impression de profondeur que l’on a d’un dessin ou d’un tableau. Il est d’une importance capitale de fixer le niveau des yeux dans un dessin fidèle à la réalité, parce que tout ce qu’il y a dans le dessin se rapporte au niveau des yeux. Si le niveau des yeux se situe proche du sol, on verrait plus de ciel que de sol. Si il se situe très haut, on verrait plus de sol que de ciel. La perspective linéaire à un point de fuite n’est pas aussi répandue de nos jours en art que celle à deux points de fuite voire plus. La perspective à un point est plutôt statique et formelle et cela correspond moins à nos conceptions actuelles. Il y a quelques siècles pourtant, on utilisait souvent cette forme de perspective.Lorsqu’il y a deux points de fuite, le point dans lequel les lignes se rencontrent à droite est le point de fuite droit, et celui dans lequel les lignes se rencontrent à gauche est le point de fuite gauche. La droite sur laquelle ils se trouvent est le niveau des yeux. Les arêtes horizontales convergent obliquement vers leur point de fuite qui leur revient. Tenez simplement une règle (un crayon, un pinceau) à bout de bras en direction de la ligne dont vous voulez déterminer l’inclinaison jusqu’à ce qu’elle concorde avec la ligne que vous voulez reporter. Déplacez la règle avec précaution jusqu’à votre papier à dessin en conservant l’inclinaison. Tout l’art consiste uniquementà ne pas donner une mauvaise inclinaison à la règle quand on la descend sur le papier. |
||
![]() |
||
![]() |
||
|
||
LA PERSPECTIVE CAVALIERE : Nous allons parler maintenant de la perspective cavalière, la première et la seule qu'on vous ait jamais présentée en cours de mathématiques. Dessinez un cube en perspective cavalière de la manière habituelle. Quand vous regardez un cube de telle façon que sa face avant vous apparaisse comme un carré, pouvez vous voir l’une des faces latérales ? Ainsi, vous constatez que la représentation en perspective cavalière n’est pas conforme à notre vision naturelle des objets. Son intérêt réside en ce que, selon une direction donnée, les rapports de longueur sont conservés. C’est-à-dire, notamment, qu’étant donné deux points A et B d’un solide S, d’images A’ et B’ en perspective cavalière, l’image I’ du milieu I du segment [AB] est le milieu de [A’B’]. Règles de construction d'un dessin en perspective cavalière : Lorsque vous utilisez la perspective cavalière vous ne vous posez pas de questions dans la mesure où vous ne réalisez que des schémas en vue de soutenir un raisonnement. Pourtant, celle-ci obéit à des règles de construction précises qu'il convient de respecter dans la réalisation d'un dessin technique par exemple. Pour réaliser une représentation en perspective cavalière d’un solide S, on commence par se donner : Un plan P (Le plan de la feuille, muni d’un axe horizontal orienté gauche droite . Une échelle X, c’est-à-dire un rapport de longueur (par exemple 1/2, 1/10). Une direction de fuite, axe orienté formant un angle A quelconque avec l’horizontale, appelé angle de fuite (souvent 30° ou 45°). Un rapport de fuite k, compris entre 0 et 1. On considère alors le solide imaginaire S’ représentant S à l’échelle X. Puis on amène mentalement le plan P de la feuille en coïncidence avec un point O du solide S’ (généralement un sommet, s’il en possède), de telle manière que S’ soit tout entier situé d’un côté de P. Pour trouver l’image M’’ d’un point M’ du solide S’ sur le plan P on commence par projeter M’ orthogonalement sur P en M’1. Du point M’1, on mène la droite de P parallèle à la direction de fuite et on reporte sur cette droite la distance M’M’1 multipliée par le rapport de fuite, dans le sens choisi au début: on obtient alors le point M’’. Pour un solide S dont les arêtes sont rectilignes, on se contente de construire les images des sommets que l’on joint les unes aux autres par des portions de droite. On dit alors qu’on a réalisé une perspective cavalière de S d’angle A, de rapport k, à l’échelle X. |
||
![]() |
||
On considère un parallélépipède rectangle de dimensions 30 ´ 40 ´ 50 mm Réalisez rigoureusement une représentation de ce solide selon les perspectives suivantes : Angle de 30°, rapport 1/2, échelle 1,5/1. Angle de 45°, rapport 1/3, échelle 2/1. On positionnera le plan de représentation de manière à ce qu'il englobe une des faces du solide. Avantages de la représentation en perspective cavalière : Elle est très simple à réaliser pour les solides usuels délimités par des faces planes. On peut mesurer et calculer simplement des dimensions réelles à partir d'un dessin. Inconvénient de la représentation en perspective cavalière : Elle n'est pas conforme et de ce fait ne conduit pas à des représentations agréables à l'oeil, ce qui la disqualifie pour des usages où l'esthétique de la représentation compte (présentation de projets architecturaux). PERSPECTIVE CENTRALE : La perspective centrale est la perspective des peintres, dont la découverte transportera d'enthousiasme les peintres de la renaissance. Pour réaliser la représentation d’un solide S en perspective centrale, on considère : Un observateur O. Un plan P situé entre O et S. Pour construire l'image d'un point M du solide on le relie à O par une droite : l’intersection de la droite (OM) et de P donne cette image M'. Pour un solide délimité par des faces planes à arêtes rectilignes, il suffit de construire les images des sommets et de relier les images obtenues. Démontrez que les images de trois points alignés sont aussi des points alignés et signalez un cas particulier. Si l'on n'oblige pas les points dont on prend les images à être de l'autre côté de P par rapport à O, montrez que l'image d'une droite est alors soit : Une droite privée d'un point (cas général). Une droite entière (1er cas particulier). Un point (2ème cas particulier, l'un des points de la droite n'ayant alors pas d'image). Explorez vous mêmes les cas de figure correspondant à des droites parallèles ou sécantes dans les cas où on se limite ou non à la partie de la droite qui est située de l'autre côté de P par rapport à O (on ne de mande pas de démonstration ici mais des schémas avec des explications). Avantage de la représentation en perspective centrale : Celle-ci est relativement conforme à notre vision des objets pourvu que nous n’observions pas l’image d’un point trop éloigné du centre de perspective, auquel cas l’image ne correspond plus au point de vue : c'est bien pour cela que l'on se place en face d'un tableau pour le regarder. Il faut également que l’angle de vision de l’objet ne soit pas trop grand : objet situé à l'intérieur du champ de vision d'un oeil humain situé en O. Inconvénients de la représentation en perspective centrale : 1er inconvénient : On se place dans un plan Q, perpendiculaire au plan image P contenant O. La trace du plan P est matérialisée par une droite D, située à une distance d de O, d = 5 cm. On considère alors une allumette [AB] contenue dans Q, non parallèleà D et son image [A’B’] sur D par la perspective de centre O. Que pouvez vous dire de l’image I’ du milieu I de [AB] ? Vous ferez un schéma dans le plan OAB. De manière générale, en perspective centrale, les rapports de longueur ne sont pas conservés entre le solide et son image. Une représentation en perspective centrale ne se prête donc pas au relevé de cote sur plan. 2ème inconvénient : Il existe bien sur des méthodes de construction d’un solide en perspective centrale mais elles sont assez délicates à mettre en oeuvre pour qui n'est pas familier avec la géométrie descriptive et/ou le dessin technique et sa terminologie (je ne les décrirai donc pas ici : reportez vous à des ouvrages spécialisés si vous souhaitez en savoir plus) Cette difficulté d'exécution découle du 1er inconvénient. AUTRES PERSPECTIVES Lorsque le point d'observation est rejeté à l'infini dans la perspective centrale, on obtient la projection orthogonale sur le plan P, encore appelée perspective parallèle. Elle n'est bien sur pas conforme. Sinon, on peut remplacer le plan de projection de la perspective centrale par une surface quelconque : une calotte sphérique ou une portion de cylindre sont les plus utilisées. On parle alors de projection sphérique ou cylindrique. Ce sont là des projections conformes, moyennant les mêmes restrictions que pour la perspective centrale classique. Gilles Josse : Lycée La Pleïade - Pont de Cheruy (38) / -xenon-@wana LA PERSPECTIVE A TRAVERS L’HISTOIRE Vous connaissez tous la perspective cavalière et la perspective des peintres, ou perspective centrale. La perspective cavalière au moins vous semble couler de source et pourtant il aura fallu de nombreux siècles avant de parvenir à l’élaboration puis à la codification de ces deux modes de représentation de l’espace. Ce texte présente un bref historique des modes de représentation en perspective. Il s'appuie sur différentes lectures que j'ai réalisée sur le sujet et notamment l'excellent ouvrage de Erwin Panofsky : "la perspective comme forme symbolique" aux éditions de minuit. Dans ce texte je fais référence à des figures et planches tirées de cet ouvrage mais que vous ne verrez pas car je n'ai pas demandé l'autorisation de les reproduire. LA PERSPECTIVE CENTRALE : Chez les romains et les grecs : Les anciens n’ont jamais possédé la perspective telle que nous la connaissons, mais ils ont bel et bien possédé des procédés de mise en perspective. On peut distinguer trois époques, correspondant à trois degrés d’évolution de ces procédés : * Une période archaïque englobant les styles de l’ancien orient (Voir fig. 13). Dans ce type de représentations sont juxtaposées ou superposées des vues en plan et en élévation d’une même figure. * Une deuxième période caractérisée par l’échelonnement latéral des figures. Dans ce mode de représentation, différentes élévations d’une même figure sont représentées de manière échelonnée. Par exemple, sur la planche 5, la partie antérieure et la partie postérieure des chevaux sont représentées, la partie antérieure étant décalée vers le haut. * Par la suite, dans une troisième période et sous l’influence de la peinture de scène (Décors de théâtre), des améliorations vont être apportées, poussant cet échelonnement jusqu’à une véritable perspective cavalière. Mais il manquera toujours l’unité de vue, ce qui se traduit par des directions de fuite distinctes pour une même figure. Pour des objets symétriques, on voit apparaître la convergence des arêtes sur un axe de fuite (Voir pl. 1), mais le point de fuite n’est pas unique pour une direction donnée, comme dans la perspective centrale moderne. On peut conjecturer que ce qui a véritablement empêché les anciens de parvenir à la perspective centrale est leur optique. L’optique des anciens s’est représentée le champ visuel sous la forme d’une calotte sphérique. Elle a du coup proclamé en toutes circonstances le principe selon lequel les grandeurs visuelles (En tant que projection des choses sur la sphère visuelle) doivent être déterminées non par l’éloignement des objets relativement à l’oeil mais par la mesure de l’angle visuel, ce qui est contraire au principe de la perspective centrale où l’on projette sur un plan et non sur une calotte sphérique : Euclide fera d’ailleurs de ce principe son huitième théorème. Ce principe est valide, mais de fait, il conduit à l’impossibilité de représenter sur un plan une figure de l’espace vue par l’oeil, du fait de l’impossibilité d’étaler une portion de sphère sur un plan sans la déchirer (Au contraire d’un cylindre par exemple). Pourtant, on peut montrer que pourvu que l’angle sous lequel on voit l’objet soit petit, les grandeurs apparentes de l’objet sont très proches dans les deux constructions, rendant ainsi possible la représentation en plan d’un ensemble d’objets de l’espace de manière cohérente et ne choquant pas l’oeil. Au moyen-âge : Au moyen-âge, on assiste à un apparent retour en arrière. Les progrès réalisés dans l’antiquité sont remis en question et jusqu’au 15ème siècle les représentations picturales vont privilégier les qualités narratives de l’image. Au détriment d’un traitement réaliste. L’espace pictural est clos, à l’image du monde clos et fini d’Aristote, délimité par la sphère des fixes. A l’intérieur de cet espace clos, l’artiste met en scène des personnages régis par des rapports symboliques, sans se soucier ni d’unité de temps ni d’unité d’espace : un même personnage peut apparaître plusieurs fois et sa taille est déterminée par sa position dans la hiérarchie sociale ou religieuse. En 1344 l’Annonciation d’Ambrozio Lorenzetti (Voir pl. 22) marque une transition, par l’apparition d’un véritable plan de base, ayant désormais pour fonction explicite de permettre à l’observateur de lire les dimensions des différents corps dont il est le support, ainsi que leurs distances respectives. Les corps cessent de flotter dans l’espace comme auparavant. Parallèlement à cela, la construction en arête de poisson est remise au goût du jour. A la renaissance : Dans l’office des morts de Jan van Eyck (Voir pl. 28), l’espace ne commence plus seulement au moment où l’on franchit les limites du tableau. Au contraire, le plan du tableau se dresse au beau milieu de cet espace, semblant y découper une fenêtre. En 1415, Filippo Brunelleschi réalise sa première expérience sur la place San Giovanni à Florence. Il a peint une vue extérieure de baptistère et il a mis au point un dispositif qui permet de faire coïncider cette peinture avec l’édifice : la tavoletta. Le tableau est peint sur une face de la tavoletta qui est percée d’un oeilleton. On tient la tavoletta face à soi du côté qui n’est pas peint et l’on regarde l’édifice par l’oeilleton. On intercale alors un miroir tendu à bout de bras entre la tavoletta et l’édifice. Si tous les éléments du dispositif sont correctement disposés, l’image de la peinture reflétée par le miroir coïncide avec une partie de l’édifice. La perspective centrale est née ! Pour en arriver là, il faut avoir dépassé la vision aristotélicienne du monde en vigueur depuis l’antiquité et renié Euclide (Tout au moins son huitième théorème). C’est la fin de la scolastique et l’émergence de la vision copernicienne du monde. Jusqu’à nos jours : Au 17ème siècle, Desargues fonde la géométrie projective formalisant ainsi les procédés mis au point par les peintres pour construire leurs tableaux en perspective centrale. LA PERSPECTIVE PARALLELE OU CAVALIERE : Elle a été utilisée empiriquement dans l’antiquité comme nous l’avons vu. En 1582 Jacques Androuet du Cerceau donne une justification rationnelle de l’utilisation de la perspective parallèle pour la réalisation des métrés d’un bâtiment. Au 17ème siècle, elle sera utilisée par les militaires pour réaliser des plans de place forte sur lesquels on puisse faire la lecture des vraies grandeurs. Elle est toujours utilisée en dessin technique de nos jours. EN CONCLUSION : On a pu voir que la représentation en plan de l’espace est profondément enracinée dans la conception qu’ont les hommes de l’univers et de la place qu’ils y occupent. Que dire alors de la peinture abstraite et quelle est notre conception sousjacente de l’univers ? Figure 1 : Dessin extrait du Carnet de Villard de Honnecourt [ERLANDE-BRANDEBURG, BECHMANN & al. 1986]. |
||
![]() |
||
La figure1 est l'un des dessins du célèbre Carnet de VILLARD qui représente trois éléments figuratifs, un nu inspiré d'un bronze antique, un socle avec draperie et un roi sur un trône surmonté d'un baldaquin. Ces trois éléments sont comme juxtaposés et illustrent clairement cette notion de compartimentage de l'espace du dessin même si les visées didactiques du Carnet peuvent aussi expliquer cette juxtaposition; seul le socle, indépendamment des deux personnages et même de la draperie qu'il supporte, s'essaye à une maladroite restitution des volumes par une sorte de mise en perspective au moyen d'une projection conique à partir d'un point de vue, origine des génératrices. "En l'absence de règles et de conventions reconnues, telles que celles qui de nos jours régissent la géométrie descriptive, le dessin géométral, la perspective et qui permettent de retrouver les vraies grandeurs et les différentes faces des divers éléments figurés, le dessinateur du XIIIe siècle devait inventer des façons de représenter correspondant à sa logique propre. Ainsi, sur certains dessins, VILLARD a figuré l'objet qu'il cherchait à représenter comme s'il était "déplié" autour d'un axe. ... Sur plusieurs de ses dessins, pour figurer une roue et en même temps son arbre, VILLARD se place en biais. ... Sur un autre dessin, il a représenté une tour selon une espèce de perspective cavalière qui rend compte à la fois de deux faces et du dessus de l'édifice. " (BECHMANN 1986 : 43) Souvent ces dessins présentent un caractère d'esquisses ayant permis la notation d'une idée constructive ou technique. Il faut se rappeler que le papier n'existait pas et que le parchemin était cher; non seulement les brouillons mais aussi les épures définitives étaient figurées sur le sol ou les faces planes des blocs de pierre destinées à disparaître dans les scellements. Le caractère oral et initiatique du compagnonnage d'alors était donc aussi justifié par la rareté des supports et le coût de toute duplication, uniquement manuelle. Fréquemment des profils métalliques étaient découpés pour faciliter la taille des nombreuses moulures de l'architecture gothique; cette méthode est encore utilisée de nos jours (gabarits en tôle de zinc). Ces productions graphiques n'avaient certes pas encore un statut scientifique, leur précarité traduisait en fait un usage accessoire dans la genèse et la production des édifices. Sans nul doute très nombreuses, elles ont disparu, parfois, comme nous l'avons rappelé, au sein même de la construction. On y trouve néanmoins ces prémisses de la géométrie descriptive que MONGE --de 1780 à 1811, date de la publication d'une nouvelle édition de son ouvrage Géométrie descriptive-- va codifierà partir, notamment, des épures effectives des tailleurs de pierre et des charpentiers. Après la présentation de ces quelques jalons historiques, nous laisserons à Pierre FRANCASTEL le soin de faire transition: On pourrait dire que le Moyen-Âge a eu une conception compartimentaire de l'espace, que la Renaissance en a eu une conception scénographique ... (1970 : 213). Parmi les peintures ou dessins qui sont des manifestes de la perspective naissante, les scénographies urbaines et théâtrales de la Renaissance, à point central de convergence, évoquent certes VITRUVE. La Città ideale du panneau dit d'Urbino exprime parfaitement cette conception scénographique. (Cf. figure 2) "Ce fut à Florence, au début du XVe siècle, que fut créé, par la découverte de la perspective, un nouveau langage plastique. Pendant les cinq siècles qui suivirent, la perspective fut l'un des éléments constitutifs de l'histoire de l'art, le credo incontesté auquel toute représentation picturale dut se soumettre. ... La perspective n'a pas été la découverte d'un seul homme; elle a été l'expression d'une époque entière. Nous retrouverons ultérieurement une situation analogue quand nous en viendrons à parler du cubisme. Là aussi, à la conception nouvelle de l'espace, issue de notre époque, répondra tout un mouvement, et non une oeuvre isolée. Ce qui est significatif, dans les deux cas, c'est la démarche parallèle de l'art et de la science, mais ce fut dans l'élaboration de la perspective que leur collaboration fut la plus étroite." (GIEDION 1990 : 56) Figure 2 : "La Città ideale" du panneau dit d'Urbino, attribué par certains historiens d'Art à Giuliano da Sangallo. La composition exprime la conception scénographique de la représentation perspective. |
||
Perspective centrale |
||
Figure extraite de Fables, formes, figures [CHASTEL 1978 : 321]. Après avoir insisté sur le fait que ces figurations du réel s'inscrivent dans la mouvance de l'histoire des arts et de la représentation picturale, centrons-nous sur la grande révolution dans les techniques de représentation. Cette invention de la perspective bifocale qui se situe à la fin du Moyen Age, est appréhendée notamment par Pierre FRANCASTEL (1970) dans les chapitres "Naissance d'un espace : mythes et géométrie au Quattrocento" et "Destruction d'un espace plastique" : "Le nouvel espace n'est pas seulement géométrique mais aussi mental. Dans ce nouveau continu, qui insiste sur le problème des positions fixes des objets, ce qui change ce n'est pas uniquement la perspective. On passe assurément d'un système de représentation que, suivant les thèses de PIAGET, on peut considérer comme projectif - ou correspondant au second degré du développement de l'esprit enfantin - pour aborder un système perspectif, euclidien - ou du troisième degré selon PIAGET. ... Désormais, on insiste à chaque instant sur la distinction entre le contenant et le contenu, trait fondamental de l'abandon des représentations topologiques et de l'adoption d'une vision euclidienne. Il en résulte une opposition entre un contenant immobile et un contenu mobile." (FRANCASTEL 1970 : 177) Les recherches en matière de représentation perspective de la Renaissance portent en elles le renouvellement, certes des arts graphiques et picturaux, mais aussi de la création architecturale de cette période. Les plus grands acteurs de cette période vont souvent être à la fois ingénieur, architecte et artiste. ALBERTI, BRUNELLESCHI, DÜRER, PIERO DELLA FRANCESCA, MICHEL-ANGE, Jean PÉLERIN VIATOR et Léonard de VINCI, pour ne citer que les figures les plus emblématiques, produisent des oeuvres architecturales ou picturales qui sont influencées par leurs recherches en matière de figuration. Figure 3 :Un projet de LEDOUX ("Maison des bûcherons", 1804) est représenté en géométral : élé frontale, en haut, et, en bas, projection cylindrique orthogonale sur un plan horizontal (dessin en plan classique). Cette représentation graphique constitue une application élémentaire de la géométrie descriptive [MONGE 1800] puisqu'elle combine deux plans orthogonaux de projection : un plan vertical, ou plan frontal, et un plan horizontal, appelé rabattement. Figure extraite du Cours de dessin d'architecture à partir de la géométrie descriptive [AUBERT 1980 : 7]. |
||
![]() |
La "Maison des bûcherons" de
LEDOUX est représentée en perspective
parallèle, appelée aussi
axonométrie ou perspective isométrique.
Ces axonométries représentent
les objets volumiques vus par
un observateur supposé situé à l'infini. |
|
La même "Maison des bûcherons" est restituée en perspective vraie
ou bifocale. Cf. figure 7 pour le détail de la construction. Figure extraite du Cours
de dessin d'architectures à partir de la géométrie descriptive [AUBERT 1980 : 7].
Figure 7 :Phases successives de la restitution en perspective bifocale de la "maison
des bûcherons" [LEDOUX, 1804] :
|
||
Détermination du tableau : mise en place de la ligne de terre LT qui passe ici par la diagonale AC du plan carré de la "maison des bûcherons" (seule l'enveloppe ABCD est figurée). Mise en place de la ligne d'horizon LH ainsi que du point de vue PV, situé huit mètres au-dessus de la ligne de terre. À partir du point de vue PV, tracé des deux droites parallèlement aux cotés AB et BC qui coupent la ligne d'horizon LH aux deux points de fuite, respectivement F2 et F1. Tracé des deux droites F2A et F1C dont l'intersection détermine la nouvelle position de l'angle B, soit B'. L'itération de cette construction permet de déterminer les deux parois vues, puis le reste de la restitution en perspective bifocale de notre "maison des bûcherons" |
||
![]()
|
||
La construction des représentations en perspective bifocale " Le système perspectif le plus répandu est la méthode bifocale avec points de distance aux bords du tableau, dont la théorie est assurée par Jean Pélerin Viator dans son traité De artificiali perspectiva (Toul, 1505). La construction perspective qui domine dans la peinture flamande relève aussi de la méthode bifocale; (DALAI EMILIANI, 1989 : 934)
|
||
Projection orthogonale |
||
Perspective frontale : Exemple d’une vitrine qui une fois réduite à l’échelle, mesure 12 cm. de longueur, sur 9 cm. de largeur, et 6 cm. de profondeur. On décide que le fond sera réduit au 2/3, donc sera de 8 cm. de longueur, sur 6 cm. de hauteur. L’emplacement sera décidé selon la hauteur de cette vitrine par rapport à la visualisation des spectateurs. On verra plus ou moins ou également le plafond ou le sol La profondeur sera calculée ensuite sur une des obliques résultant de ces emplacements. Pour illustrer la mise à l’échelle et en volume, nous allons dessiner deux cubes dans ce espace, un de 3 cm. de côté posé sur le sol, et un de1,5 cm. suspendu à mi-hauteur. Le premier, placé à 1.5 cm. du bord gauche, sera projeté sur le fond à 1 cm. du bord gauche du fond (2/3) et de 2 cm. de côté (2/3). Après avoir mesuré une des obliques calculer la réduction que la profondeur a subi et réduire au même rapport la profondeur du cube sur cette oblique. Projeter les traits sur le cube. Cette vue de face est très utilisée par les décorateurs, mais est nettement plus fasti dieuse que la projection orthogonale, qui n’a pas de réduction de profondeur, mais restitue tout aussi bien l’aspect visuel. |
||
Perspective à 1 point de fuite |
||
Perspective à 2 points de fuite |
||
Perspective à 3 points de fuite |
||
![]() |
||
![]() |
||
![]() |
||
![]()
|
||
Dessin de Bashuk Veseli classe 7VSO
|
||