Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Jonas Kocher, j’ai 30 ans et je suis un pur Renanais. J’ai grandi et j’ai fait toutes mes écoles obligatoires à Renens. J’ai un parcours universitaire : j’ai fait la HEC Lausanne, puis récemment, j’ai obtenu un master en droit à l’Université de Lausanne. Et aujourd’hui, depuis le 1er octobre, j’ai pris mes fonctions de préfet du district de l’Ouest lausannois. J’ai été nommé par le Conseil d’État pour cette mission.
Quel est concrètement votre rôle ?
Je joue un double rôle, si je peux dire. Les préfets sont ce qu’on appelle des magistrats. J’ai à la fois un volet communal et un volet juridique. Dans le volet communal, j’ai ce qu’on appelle l’autorité de surveillance des communes. Je dois m’assurer que les tâches régaliennes sont bien exécutées, que les registres de la population sont à jour, que l’exécutif fonctionne bien, que le législatif fonctionne bien et que, finalement, la machine de l’administration communale ne soit pas bloquée. C’est un premier rôle. Le deuxième rôle est plus juridique. Je suis autorité en matière pénale pour tout ce qui concerne les contraventions. Si quelqu’un commet une infraction à la LCR, des infractions liées à la drogue ou dans les restaurants, c’est mon autorité et je peux amender les gens. Le deuxième volet juridique concerne la commission de conciliation en matière de bail. Tous les litiges en droit du bail sont traités par cette commission, que je préside.
Pourquoi vous ? Vous pouvez intervenir en cas d’infraction, pourquoi un préfet et pas un simple juge ?
Il y a eu la réforme du CPC dans les années 2010-2011. On a uniformisé tout le code de procédure en Suisse, car avant, chaque canton avait son propre code de procédure juridique. Certaines compétences spécifiques ont été attribuées aux cantons. Le canton de Vaud a notamment décidé de confier certaines tâches aux préfets, notamment tout ce qui touche aux contraventions et au droit du bail. L’idée est de ne pas surcharger le ministère public, mais au contraire de lui donner un peu d’air pour qu’il puisse continuer ses tâches. Voilà pourquoi ce sont les préfets qui président la commission de conciliation et qui sont les premiers juges en matière pénale pour les contraventions.
Quelles études avez-vous dû faire pour devenir préfet ?
Il n’y a pas de formation spécifique ou d’apprentissage comme pour devenir ébéniste. On nous demande d’être un peu comme un médecin généraliste. Si je caricature un peu, il faut tout savoir sur le fonctionnement d’une commune. Il faut aussi avoir beaucoup de connaissances juridiques. Moi, j’ai fait de la politique depuis mes 18 ans au niveau communal et cantonal, j’ai été dans l’exécutif d’un parti cantonal, j’étais même vice-président. Et pour le volet juridique, j’ai eu ma formation à l’Université de Lausanne, où j’ai fait un master en droit. Il faut toucher à tout.
Quelle est la chose la plus difficile dans votre métier ?
C’est gérer les dénonciations des enfants qui ne vont pas à l’école. Je me retrouve face à des situations parfois complexes, où ce n’est pas juste un enfant qui ne veut pas aller à l’école, il y a souvent autre chose derrière. C’est un volet auquel je ne m’attendais pas. J’ai pris un sacré coup quand j’ai eu certaines dénonciations et certains parents et enfants dans ma salle d’audience.
Je sais que vous avez plusieurs tâches, mais quelles sont principalement les conciliations ?
On a beau penser que les litiges sont toujours les mêmes, comme des gens qui contestent les augmentations de loyer, et toute la matinée, j’ai cinq cas qui concernent exactement cela. Et en fait, chaque dossier est différent. Et puis, on a vraiment ce rôle de conciliateur : essayer de trouver une solution pour que toutes les parties parviennent à un accord et qu’elles repartent de la préfecture avec une solution trouvée, sans que l’affaire ne s’envenime et n’aille au Tribunal cantonal. C’est ça, un peu. Et en plus, du coup, la journée passe beaucoup plus vite, car j’ai douze audiences par jour. On les enchaîne un peu et, à la fin de la journée, parfois, on n’a pas tout consigné, mais on a l’impression d’avoir servi à quelque chose.
